Rock The Street : La croisée des cultures


Nous sommes parties à la rencontre de Sully Sefil, rappeur et fondateur de la marque de street wear, Rock The Street. Au delà d'une simple marque, Rock The Street représente un veritable état d'esprit qu'on vous laisse découvrir par vous même dans cette interview. Bonne lecture.


INTERVIEW

Sully Sefil

Peux-tu te présenter ?

Je me présente Sully Sefil, je me considère comme un artiste urbain, si je puis dire, qui évolue dans la mode et la musique.

Ton parcours ?

Je n’ai pas fait d’études. À l’époque, mon père voulait que j’aille à l’armée parce que c’était obligatoire. J’ai plein de potes qui ont fait les fous pour ne pas partir, moi, je ne pouvais  pas sinon mon père me défonçait (rires). Donc, j’ai dû faire l’armée pendant un an à 18 ans. Franchement c’était une punition ! Puis je suis revenu, j’ai cherché du taff. J’ai travaillé à la RATP. 
Pendant que je vendais des tickets, j’avais la chance d’être seul dans ma cabine de la station pour pouvoir écrire mes textes. J’ai fait ça pour commencer et très rapidement, je suis arrivé à faire des sons. Je me suis retrouvé avec Busta Flex qui faisait la première partie de NTM donc j’ai dû arrêter le taff pour pouvoir partir en tournée avec eux. Et au final, c’était un bon choix. Je gagnais bien ma vie, je pouvais vivre de mon art. 

C’est vrai qu’à un moment je sentais cet étouffement de ne pas pouvoir faire ce que je voulais quand je travaillais à la RATP, et j’ai écris le morceau « J'voulais ». Pour moi, c’était cet enfermement qui faisait que j’en avais marre de ne pas pouvoir vivre de mon art. Ce morceau est né de cette façon là, et ça reste pour moi une fierté. 

Justement, on t’as connu avec la chanson « J’voulais », après on n’a plus trop entendu parler de toi, qu’est-ce tu as fais de ton temps ? 

C’est vrai qu’après mon premier album, je me suis un peu retiré de la scène pour différentes raisons. J’avais créé une marque à l’époque qui s’appelait Royal Wear, ça s’est plutôt mal terminé avec les associés. Du coup, je me suis retiré pour me concentrer sur moi même et savoir ce que je voulais développer dans l’avenir. 

J’ai développé une première marque Dumpe Fresh et, par la suite le concept Rock The Street qui est plus qu’une marque de fringues, je considère réellement ça comme un mouvement artistique. J’ai aussi préparé mon nouvel album. 





Tu as toujours voulu évoluer dans ces 2 milieux différents, la mode et la musique ?

J’ai beaucoup de créativité en moi, beaucoup d’idées qui me passent par la tête et, c’est vrai qu’un artiste pour moi c’est sa musique et mais c’est également son image. C’est important de développer ça. Pour le coup avec la marque Royal Wear, j’étais le premier rappeur français à développer une marque de fringues. Quand je voyais des gens comme Michael Jackson ou d’autres, où il y avait effectivement la musique qui faisait rêver plus l’image, ça semblait juste logique pour moi de développer les deux.

"... on en a rien à foutre parce qu’on est libre de vivre et de penser comme bon nous semble et ce n'est pas de juste de l’anarchie gratuite et de l’insulte. "

Et Royal Wear, pourquoi ça s’est terminé ? 

Je me suis un peu fait avoir par des gens malveillants. Ils ont investit sur moi et ont fini par prendre l’argent pour se le mettre dans les poches, et prendre plus la grosse tête que moi qui était l’artiste du truc... Certainement le fait de côtoyer des stars qui étaient sponsorisés par la marque. Jusqu’au point de faire de la contrefaçon et la vendre sur des réseaux parallèles ! Donc voilà, c’est un peu parti en sucette si je puis dire ! 

Maintenant c’est du passé, ça reste quand même la plus belle expérience de ma vie. Partir de rien et se retrouver dans les locaux de Thierry Muggler sur 3 étages, avoir un studio d’enregistrements, des bureaux et un magasin dans l’immeuble, ça reste quand même une aventure juste géniale dans la vie de quelqu'un. 


Quand tu t’écorches à la vie, ça donne aussi de la consistance. Après ça, tu deviens quelqu’un qui a vécu des choses et qui a du contenu. Ce sont des choses qui sont à la base négative mais qui t’amènent aussi du positif quoi !



Comment as-tu su te relever à chaque fois ?

Tout simplement parce que ma créativité est énorme. À chaque fois, j’ai des milliers d’idées qui viennent, je ne peux pas rester sans rien faire ! 

Comment surmontes-tu les gens qui te mettent des bâtons dans les roues  ? 

En fait, on a pas le choix ! Soit on meurt soit on se relève et on reprend une vie normal de salarié dans une petite boîte, ou bien on croit en ses rêves et on se donne les moyens de réussir. Et comme on dit souvent, ce qui ne tue pas rend plus fort !
C’est comme si tu vas au cinéma et que tu regardes un film où du début à la fin, le mec est heureux, c’est un peu relou tu vois. Et si le mec se casse la gueule, se bat et se relève et trébuche puis remonte la pente, ça devient passionnant. Grâce à tout ses accidents, ma vie a quelque chose de passionnant, sans aucune prétention. Il faut savoir se servir de ses erreurs pour écrire son histoire et essayer de progresser. 

"A la conquête du bonheur, je continue ma route,
Là, où mon destin me pousse, pas de vie sans douleur.
Je m’accroche, je ne lâche pas,
Jusqu’à la fin, je combattrais comme un soldat."



C’est le refrain de mon nouveau morceau « Comme un soldat ».


Et donc tu reviens avec la marque Rock The Street, peux-tu nous en parler ? 

Rock The Street, c’est pour moi un accomplissement parce que j’estime avoir ambiancé la rue pendant ma carrière artistique et en l’habillant avec Royal Wear.  Je l’ai ambiancé avec mon premier album en faisant des sons pour NTM et différents groupes de rap français, en tant que street artiste, avec mon autre marque Dumpe Fresh, on a fait pas mal de défilés dans la rue... J’ai aussi dansé sur des cartons dans la rue à l’époque du Hip Hop, comme d’autres ambiancent la rue avec leur skateboard, leur BMX, ou autre.

Le X du logo symbolise la croisée des rues et des cultures, c’est un mélange de genre et de style. C’est du rock, du hip hop, de l’électro mais aussi du skate, du FMX, du BMX, du stunt, etc. C’est un peu un mélange de tout ce que j’aime ! C’est comme si j’étais un enfant qui avait besoin d’avoir tout ses jouets à côté de lui ! Et c’est également un mélange culturel car je pense que l’union fait la force et le mélange, la richesse. En l’occurence, on devient plus fort en s’inspirant de diverses choses.

Voilà ce qu’est Rock The Street, avec un slogan qui est « We Don’t Give A Fuck ! » qui se traduit par « On en a rien à foutre ». Mais on en a rien à foutre parce qu’on est libre de vivre et de penser comme bon nous semble et ce n'est pas juste de l’anarchie gratuite et de l’insulte. Effectivement, on est pas dupes quant à cette société qui nous gouverne, ces gens qui se foutent de notre gueule, qui sont toujours mis en examen et qu’on voit encore élus chaque année.  C’est plus dans ce sens là, c’est notre liberté.

Tu dis « nous », est ce qu’il y a d’autres personnes qui participent à ce projet ?

Oui, déjà on ne fait rien tout seul dans la vie et c’est vrai qu’il y a beaucoup de gens qui ont cette même façon de voir les choses. Beaucoup de gens aimerait être libre et faire ce qu’ils aiment. Après, c’est vrai que je suis assez entouré, quand je dis « nous » c’est toute mon équipe qui a développé ce mouvement. C’est aussi bien des mecs qui font de la moto, du BMX, du skate, comme je disais tout à l’heure, du parcours, de la danse, et pleins de choses encore et qui sont sponsorisés par Rock The Street. C’est une grande famille, vraiment !

Afro Punk

" Ce n’est pas juste une marque, il y a un véritable état d’esprit avec un slogan qui signifie quelque chose"


Alors Rock The Street aide aussi les autres artistes à s’exprimer ?

Absolument ! Autant qu’on peut en tout cas, nous n'avons pas des gros moyens. La dernière fois, des petits jeunes de 10/11 ans qui font du skate voulaient des fringues pour faire une vidéo. Ils rêvent de la marque tu vois, on leur a donné des fringues et ils ont ramené une vidéo très qualitative qu’ils ont monté eux même ! 

Franchement, dès qu’on peut donner la main à des petits jeunes qui ont envie de créer des choses, on le fait carrément. Avec des stagiaires de la même façon ! On est grave ouverts. C’est très simple, c’est notre façon d’être. Aujourd’hui, les temps sont difficiles pour beaucoup de gens, et une fois de plus, l’union fait la force donc cette marque tombe bien dans l’époque quelque part…


Par rapport à l’armée de gens en vélo, en skate dont tu parles, comment as-tu réussi à développer ça ? Et est-ce que tu fais du skate ?

Je ne fais pas de skate mais j’ai des potes qui en font. Ma mère était infirmière, et il y avait tellement de gens qui venaient avec le bras cassé qu’elle ne voulait pas m’en acheter. J’étais dégoûté ! (rires) Après effectivement, j’ai beaucoup de potes qui en font et quand je vais les voir, j’adore ! Ils ne portent pas forcément du Rock The Street pour la marque mais tout simplement parce qu’ils ont le sentiment de « Rock The street » avec leurs skates ! Même les bikers sont en total adéquation avec ce que représente le logo et le collent sur leurs motos. Toutes ces personnes viennent à nous de façon naturelle. Encore tout à l’heure, Sly Johnson sortait du bureau, il m’a montré son dernier clip dans lequel il portait du Rock The Street et il aimerait bien être égérie de la marque, il en est fan. 



Un vrai phénomène est en train de se produire. Pour l’instant, on est distribué uniquement dans cette petite boutique. Beaucoup de gens ne savent qu’on existe mais ceux qui découvrent la marque en tombent vraiment amoureux ! Il y a une belle aventure à vivre et on espère qu’on sera de plus en plus connu et qu’il y aura d’autres points de vente en France et à l’international. Il peut y avoir encore de beaux jours pour Rock The Street, tout reste à faire ! Il y a vraiment un noyau très solide avec quelque chose de très réfléchi. Ce n’est pas juste une marque, il y a  un véritable état d’esprit avec un slogan qui signifie quelque chose. 

Parles nous de ta collection ?

C’est des couleurs basiques: blanc, noir et gris. En terme de clips, on est beaucoup sur du noir et blanc, dans les photos également, donc on essaie d’avoir notre propre style. On part sur des couleurs assez simples pour évoluer après et se faire une identité. Peut-être que plus tard, je voudrais en mettre plus. On a des idées tous les jours, on essaie de concrétiser comme ça. On ne tient pas compte des saisons car on est quand même dans un premier temps une marque de t-shirts. Après, il faut plus de moyens pour faire des grosses vestes en cuir qui j’espère viendront très prochainement. 




Tu continues aussi la musique à côté ?

Oui effectivement, je continue aussi la musique. Comme je disais le X symbolise la croisée des mondes et des cultures donc un mélange de genre. L’idée est vraiment de mélanger les genres pour enrichir ma musique. On a commencé à mettre quelques morceaux sur le net qui vont dans ce sens là. Ce n’est que le début. J’ai aussi envie de mettre en avant des gens plus jeunes que moi comme Dyron Ferguson qui est un peu mon petit poulain. 


Dyron Ferguson

Rock The Street sera donc aussi un label ?

Ouais ! Après, on a pas besoin de se mettre tout de suite en label, on a surtout besoin de créer du talent et une fois qu’on aura de la richesse artistique, on pourra penser à la manière de s’organiser. L’idée est de faire de la musique de qualité, des trucs originaux et  le moment viendra de penser à la façon de la vendre. C’est déjà un label dans l’esprit, ce n’est pas forcement écrit noir sur blanc mais il y a pas d’urgence pour ça en fait ! 


Quelle est la suite pour toi ?

Ce n’est pas évident à dire dans une époque où on est un peu dans un tournant, avec internet qui a pris le dessus et les nouvelles façons de consommer, il faut s’adapter. C’est constamment en train de bouger ! Ce qu’il va se passer ? Je n’en sais rien, je ne suis pas devin. Après, je fais ce que j’aime donc l’idée serait de continuer même si c’est pas tous les jours évident, je le fais avec le coeur et je pense que c’est assez visible. 

La musique, c’est quand même un luxe, il faut vraiment le vouloir. J’ai vu plein de gens disparaître. À partir du moment où tu vieillis et tu as des enfants, il faut subvenir à leur besoin. La vie d’artiste est aléatoire. En tout cas, je sais que ce projet est ambitieux et colossal. Internationalement, des gens m’appellent de New York pour me féliciter. Aux Etats-Unis, aucun rappeur n’a développé une chose de la sorte ! Maintenant, c’est vrai qu’il nous faudrait un investisseur pour pouvoir passer au niveau supérieur et on espère le trouver prochainement. On va avancer avec nos petits moyens, notre savoir faire et se battre.

Qu’est ce-tu conseilles aux personnes qui sont passionnées et qui voudraient percer dans la mode ou la musique ?

La vie est dure. Il ne faut pas croire que tu te lances et ça y est ça marche et c’est super ! Si ces gens là peuvent avoir un petit taff avant de déployer leurs ailes, essayer d’économiser de l’argent pour se mettre à l’abri et avoir un petit appartement, c’est la meilleure des choses. Il faut avoir cette sécurité, ne pas rêver et trouver les meilleurs partenaires possibles, en qui ont peut avoir confiance. Et ne jamais faire confiance à 100%, toujours avoir un oeil sur les choses dans la mesure du possible...






Rock The Street en 3 mots ? 

Déjà, ce serait la liberté. Libre de vivre et de penser comme bon nous semble. La passion, car il faut être passionné pour faire du skate, pour faire ce qu’on aime, comme vous êtes passionnés pour faire ce que vous faites. Et l’amour parce que j’aime mon prochain, même si les gens ont tendance à être terriblement cons ! C’est vrai qu’aujourd’hui la superficialité prend vachement le dessus par rapport aux valeurs qui elles disparaissent considérablement...


Rock The Street, 
46, rue Tiquetonne 
75 002 Paris 

Rock The Street on FB
Rock The Street Website 










Photo Credit Architect Behavior 







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